1On ressentit très tôt au Maghreb le besoin de créer une terminologie africaine adaptée aux découvertes préhistoriques. Mais la proposition du terme Maurétanien ne sera pas retenue. Lorsqu’en 1909, P. Pallary crée le Maurétanien, il l’attribue au mobilier néolithique qu’il vient de découvrir dans la grotte des Troglodytes, située dans le massif littoral oranais du Murdjajo. Souhaitant sans doute de nouvelles confirmations régionales, il omet d’accompagner cette prise de date d’une description et d’une illustration, cela lui sera fatal.
2Lorsqu’en 1912, paraît l’excellente étude du Dr. E.-G. Gobert sur l’Abri de Rédeyef* (Gafsa, Tunisie), assortie d’une présentation de la stratigraphie du site et du contenu des trois contextes culturels successifs qu’il a découverts, sans réticence chacun s’accorde à reconnaître pour le mobilier le plus récent d’indéniables similitudes confortant la pertinence des remarques initiales de P. Pallary. Aussi ne s’étonne donc pas de voir le Dr. Gobert souligner que « les trouvailles de la grotte des Troglodytes sont frappantes d’analogie avec les nôtres : aiguilles d’os poli identiques, trapèzes, petites lamelles à encoches multiples, bilatérales, flèches barbelées identiques, mais moins nombreuses, même culs de vases coniques, même poterie décorée sous l’orifice par impression d’une section de tige ». On aurait pu penser qu’à la faveur de cette extension géographique des observations, le terme Maurétanien allait s’imposer, dès la publication de Rédeyef ; E.-G. Gobert choisit d’utiliser la terminologie européenne. Admis dès lors avec une acception principale de faciès, et une dimension chronologique implicite, le terme Néolithique fait ainsi son entrée dans le vocabulaire de l’Afrique du Nord.
3Lorsqu’en 1922 P. Pallary entreprend l’analyse du mobilier de la grotte des Troglodytes, il est déjà trop tard. Néolithique s’est banalisé dans les écrits de ceux qui explorent les grottes du Constantinois et de Tébessa. En 1933, lorsque R. Vaufrey lancera l’hypothèse de l’existence au Maghreb d’un unique faciès, qualifié de « Néolithique de tradition capsienne », il sait déjà que l’antériorité du terme « maurétanien » est irrecevable, « le maurétanien n’ayant pas été fondé sur une diagnose précise et illustrée, ne bénéficie pas des règles de la priorité. Il n’y a donc pas synonymie... » (Vaufrey, 1955, p. 291).