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Antiquité, Ethnonymie, Tribu
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1Les Maces ont aidé les Carthaginois à rejeter à la mer les Grecs de Dorieus en 514-512 (Hérodote V,42) et ils sont autorisés à circuler en Cyrénaïque par le décret de l’Empereur Anastase en 500-505, deux attestations séparées par mille ans et par mille kilomètres. Les Macae de Pline, les Maces de Silius, les Makai de Ptolémée et de Diodore comportent un radical MK-, qui peut être phonétiquement déformé en BK- ou VK-, et qui alterne avec МKh-, forme surtout courante chez Ptolémée. Le vocalisme habituel du radical est en « a », mais on peut lui rattacher des formes en u/ou. On rencontre des formes élargies par une consonne supplémentaire, ou même par un véritable suffixe (par exemple –ousios) : elles désignent des ethnies, dont le rattachement aux Maces est possible. Les noms d’autres peuples d’Afrique du Nord sont construits sur ce même radical MK-mais cette communauté pourrait être préhistorique, ou hypothétique, comme celle des divinités indigènes Macurgum, Macurtam, Vacurtum, auxquelles Galand a proposé de rattacher le « génie berbère » Maqur. (Cf. note linguistique complémentaire de S. Chaker).

2Des affinités religieuses et topographiques permettent de se demander si les Nasamons* n’étaient pas primitivement des Maces, qui doivent en revanche être rigoureusement distingués des Imazighen*, représentés par les peuples Mazices ou Mazaces*.

3Les Maces Gétules. Alors que les Maces sont déjà attestés en 514-512, le terme Gétule est connue seulement à la fin du IIIe siècle par un épisode de la guerre punique (Tite-Live 23,18,1). Mais pour Strabon (II,5,33 ; XVII,3, 2-3), les « autres Gétules » de sa description ethnique sont évidemment des Maces. Les Maces sont vêtus de peaux de chèvres, et c’est un thème récurrent que le Gétule habillé de peaux ou de tissus de poils de chèvres. C’est en territoire mace qu’on trouve les Gaetulos, accolas Syrtium (Florus II,31) vaincus par Cornelius Cossus ; le toponyme Gaetulu de la Table de Peutinger entre Oea et Lepcis ; les Bagi (=Vagi) Getuli au sud de Sabratha et à l’ouest du Cinyps ; les Getuli signalés au nord et au sud d’une montagne située au-delà de l’Autel des Philènes ; et les Syrtes gétuliques de Claudien (Eloge de Stilichon I, 258 : stant puluere Syrtes Gaetulae).

4Localisation des peuples maces. Nombre d’énumérations ethniques (de Strabon, de Pline, ou de la Chronique de saint Hippolyte et de ses apographes) ne donnent pas de précisions topographiques, non plus que les poètes qui recherchent surtout des noms sonores de barbares. Mais on dispose d’autres informations.

5Sur la côte, pour Hérodote, le pays des Maces va du creux de la Syrte au Cinyps (Ouadi Chaam), au voisinage de Lepcis. Le pseudo Scylax les place lui-aussi à l’ouest des Nasamons, jusqu’au Cinyps, et Diodore le long de la Syrte ; outre les Gétules déjà cités, on trouve les Macares Vagi (MK-r) de Corippe, approximativement situés entre le Djebel Nefusa et les Chotts. En pays mace ont été dessinés les territoires des cités de Sabratha, Oea, Lepcis, Tubactis et Macomades, ce qui n’exclut pas l’appartenance d’une partie de leurs habitants à l’ethnie primitivement installée. Oea s’appelait Makaraia pour le Stadiasme (98-99) : MK-r-aia/oea peut vouloir dire « Oea des Maces ».

6Vers le sud, Ptolémée place les Makkoi « sous le mont Girgiri en direction des Garamantes », mont où, pour lui, le Cinyps, Cinyps légendaire, prend sa source (Vibius Sequester, Flumina, 53). Il est de fait exact que le territoire des Maces cesse au sud là où commence celui des Garamantes. La Hamada el Hamra, le Djebel Soda, le désert syrtique les séparent, des pistes caravanières les relient. La profondeur du territoire des Maces est souvent notée. Pour Strabon et Diodore, il s’étend au-delà des zones civilisées. Après les fouilles de Bu Njem/Gholaia, nous avons émis l’hypothèse que le réseau militaire romain couvrait le pays mace, et en dessinait la frontière vers les Garamantes. Le djebel de Tripolitaine était en territoire mace, et de même les grands ouadis coulant du Djebel vers l’est, le Sofeggine et le Zem Zem. L’alphabet libyque de Bu Njem, celui de Ghirza et quelques témoins libyques épars se trouvent dans cette partie du territoire mace.

7Vers l’est, le décret d’Anastase règle vers 500 les modalités de circulation des Maces en Cyrénaïque, dont ils étaient apparemment les voisins. Nous trouvons dans la même région les Vacathii de Pline, les Bakatai et les Makatoutes de Ptolémée, les Maketai de Synésios, les Makaten d’Epiphane de Salamine, tous noms formés avec l’élargissement -T- du radical, MK-T-. Il y a ensuite des MK-L-, les Bakales d’Hérodote, d’Agroïtas et de Nonnus. Les Maketai de Synésios, les Makai d’Anastase, les Bakales voisins de Taucheira, confinent avec les grandes cités de Cyrénaïque, tandis que Vacathii, Makatoutes, Bakatai confinent au désert, le voisinage des Bakatai et des Nasamons autour d’Augila étant particulièrement notable.

8Vers l’ouest, l’implantation militaire dans le Gheriat et la grande citerne caravanière de Sciueref sont probablement en pays mace. mais au-delà vers l’ouest, Cidamus n’en est pas, comme le montrent ses traités particuliers avec Rome, non plus qu’une partie de la piste directe qui la reliait à Sabratha (Pline V,35). Au-delà du Djebel, vers l’ouest, nous rencontrons des MK-L et des MK-R, L et R semblant être deux graphies alternatives : les Makhlues d’Hérodote, les Machrues de Ptolémée, les Macales/Imaclas et les Macares Vagi de Corippe. On peut penser aussi aux Maxues d’Hérodote, aux Machunoi de Ptolémée, et aussi à ses Mouchthousioi. Des localisations obligatoirement imprécises se regroupent cependant en un bloc situé à l’ouest de la région où nos sources parlent seulement des Maces sans élargissement consonantique.

9Si nous admettons une tendance nette des Maces de l’est ou de l’ouest à se fractionner en groupes, caractérisés par des choix morphologiques (surtout des élargissements du radical), comme tout groupe humain qui veut souligner son originalité grâce à une variante particulière de la langue commune, le bloc mace inclurait les marges sud-ouest de la Cyrénaïque, jusqu’à Augila et s’étendrait jusqu’au sud Tunisien, respectant Cidamus et le domaine garamantique. Dans ce domaine, certaines fractions se sont distinguées par un nom particulier Seli de Macomades Selorum (Silvacae, Silcadenit, Silvaizan, Silzaltae), Beitani (de l’oued Bei el Kebir), Curbissenses ou Gurbisenses, Naffur ou Naffusa, tandis que les Beni Ifren rappellent le toponyme Ifera.

10Importance historique des Maces. Bien avant l’épisode de Dorieus, le peuple des Mashwesh, incontestablement situés à l’ouest des Libous, occupe le futur territoire mace. On peut donc poser la question de l’identité des Maces et des Mashwesh, connnus par leur confrontation avec l’Egypte du IIe millénaire et du début du Ier. Les Carthaginois ensuite ont su s’allier aux Maces, comme au temps de Dorieus, et sans avoir superposé leur domination directe à l’étendue du domaine mace, ils ont bénéficié de cet hinterland et de l’hostilité des Maces envers les cités de Cyrénaïque, tandis que celles de la Syrte ont été à l’abri de la nuisance numide et du destin funeste de Carthage.

11Après la guerre gétulique et la victoire de Cossus, une longue symbiose avec l’Empire s’établit. Le pays mace devient une large étendue d’agriculture sédentarisée, et l’événement le plus important est l’irrédentisme des Nasamons, longtemps contenu, puis déferlant dans la seconde moitié du IVe siècle.

12L’histoire politique des Maces au Bas-Empire et au-delà semble bien se dissocier par secteurs, les uns d’une inébranlable fidélité à l’ordre ancien, d’autres tentés par les voies de l’insurrection. Une fracture religieuse s’établit entre les Maces christianisés et les fidèles de Sinifère, Gurzil ou Mastiman. Jean Troglyta, après sa victoire de Lavara en 548, est allé détruire Ghirza et occuper Augila. Mais l’ancienne « Macie » ne pouvait disparaître aisément, ni la conscience d’appartenir à un même peuple. Quand sur le territoire naguère mace se trouve un grand peuple appelé Mazâta, nous ne voyons pas pourquoi il ne s’agirait pas des anciens Maces, jouant encore un rôle partiel, mais effectif, dans l’histoire de la Tripolitaine.

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Bibliographie

Galand L., « Note à propos d’une génie berbère », Journal Asiatique 1964, p. 105-107.

Lewicki T., « Mazâta », Enc. de l’Islат, VIII, 1991, p. 935-941.

Moderan Y., « Corippe et l’occupation byzantine de l’Afrique », Antiquités Africaines 22, 1986, p. 195-212.

Moderan Y. « Les premiers raids des tribus sahariennes en Afrique et la Johannide de Corippus », IVe Colloque du CTHS, Strasbourg 1988 (1991), p. 479-490.

Moderan Y. Les Maures et l’Afrique romaine (IVe-VIIe siècles), Rome 2003.

Rebuffat R. « Notes d’onomastique ethnique. Les Maces. », L’Africa romana XVI, 2004 (2006), p. 403-444.

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Pour citer cet article

Référence papier

R. Rebuffat, « Maces »Encyclopédie berbère, 30 | 2010, 4460-4463.

Référence électronique

R. Rebuffat, « Maces »Encyclopédie berbère [En ligne], 30 | 2010, document M06a, mis en ligne le 17 septembre 2020, consulté le 17 avril 2024. URL : http://journals.openedition.org/encyclopedieberbere/386 ; DOI : https://doi.org/10.4000/encyclopedieberbere.386

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Auteur

R. Rebuffat

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